Grenoble et ailleurs : partout de la souffrance au travail

27 avril 2018 par APH

Action Praticiens Hôpital a pris connaissance avec attention du rapport du Médiateur Mr Edouard Couty sur la situation au CHU de Grenoble, sous les feux de l’actualité depuis le suicide de notre jeune collègue neurochirurgien, les accusations de harcèlement moral et déclarations de grande souffrance de plusieurs médecins, dans un contexte de conflits entre médecins dans plusieurs services, de contraintes financières lourdes et d’un management semblant peu adapté aux enjeux.


Il n’est pas dans notre rôle d’intersyndicale nationale de prendre parti ni de dénoncer qui que ce soit dans cette affaire, mais il est bon de rappeler plusieurs choses :

  1. Nous sommes entièrement solidaires de tous nos collègues pris dans des conflits et des drames épouvantables.
  2. La stigmatisation et la médiatisation d’un établissement sont toujours difficiles à vivre, notamment pour les acteurs de cet établissement, qui peuvent ne pas reconnaître leur hôpital à travers ce qu’en rapportent les médias. C’est dans le calme que ces situations devraient se régler.
  3. L’interpellation effectuée par le député Olivier Véran et la réponse de la Ministre de la Santé, l’intervention du médiateur et le fait que ce rapport ait été rendu public, sont pourtant une excellente chose car ces situations de souffrance au travail seraient moins nombreuses si elles étaient toujours rendues publiques.
  4. Au-delà des situations concrètes décrites, les problèmes rencontrés au CHU de Grenoble existent partout ailleurs. Les contraintes financières, la logique comptable, l’application de la loi HPST avec une gouvernance renforcée qui prend des décisions inadaptées ou mal expliquées et mal comprises, sont la règle dans de très nombreux hôpitaux.
  5. La souffrance au travail est devenue un lieu commun à l’hôpital public, en 10 ans. Les causes en sont hélas bien connues désormais, mais rien ne change. La tarification à l’activité, les pressions incessantes pour gagner des parts de marché et obtenir une rentabilité illusoire pour un service public, l’absence de
  6. remise en question des pouvoirs et de ce fait l’absence de démocratie intrahospitalière, notamment de représentation syndicale médicale locale institutionnelle, un management inadapté, la perte du sens du travail, ont engagé l’hôpital dans les mêmes symptômes que certaines entreprises.

Action Praticiens Hôpital s’est engagé dans une démarche de soutien individuel aux collègues via un
observatoire de la souffrance au travail (OSAT-APH). Au bout d’un mois de fonctionnement, le bilan est lourd
au vu du nombre de collègues à aider. Il y a donc des causes systémiques, partout sur le territoire, et c’est là que doivent se situer les actions. APH sera toujours là pour éviter ou combattre les incendies mais au rythme où les conflits explosent, ça ne pourra pas suffire beaucoup plus longtemps en l’absence d’une transformation profonde du mode de fonctionnement et de la gouvernance des hôpitaux publics.

Nous demandons donc un Grenelle de l’hôpital, qui doit démarrer rapidement si on ne veut pas voir d’autres collègues craquer ou d’autres hôpitaux stigmatisés. Au vu de tous les conflits en cours que nous suivons de très près, la situation de l’hôpital public devient de plus en plus explosive.